"L'atelier" de Laurent Cantet, le pouvoir des mots


Le dernier film de Laurent Cantet est une plongée intense au cœur de la jeunesse. Celle qui, en perte de repères, cherche à trouver sa place. L'atelier d'écriture animé par une romancière les mettra sur la voie de leur histoire et de leurs blessures aussi. Un film puissant, lumineux, intelligent. 


Résumé


La Ciotat, été 2016. Antoine participe à un atelier d’écriture où quelques jeunes en insertion doivent écrire un roman noir sous l'égide d’Olivia, une romancière connue. Le travail d’écriture va faire resurgir le passé ouvrier de la ville, son chantier naval fermé depuis 25 ans, toute une nostalgie qui n'intéresse pas Antoine. Davantage connecté à l'anxiété du monde actuel, il va s’opposer rapidement au groupe et à Olivia, que la violence du jeune homme va alarmer autant que séduire.

Alchimie

Dès les premiers instants du film, c'est l'alchimie qui saute aux yeux. Alchimie qui opère au cœur de cette galerie de personnages tout d'abord. Séduisants, attachants, fascinants tous crèvent l'écran, avec une mention spéciale à Matthieu Lucci totalement bouleversant et dont c'est le premier film (!). Des adolescents spontanés dont le naturel désarmant apporte un vent de fraîcheur devenu rare au cinéma. Une atmosphère qui rejaillit sur la prestation très juste de Marina Foïs tout en retenue et en finesse. Bref, niveau casting, c'est tout bon. 


Fiction, documentaire, film noir

L'intrigue ensuite. L'Atelier, réalisé par Laurent Cantet, captive parce qu'il arrive à raconter l'air du temps, d'ordinaire si difficile à capter. En convoquant de nombreux thème sociétaux, dont l'insertion, la religion, l'éducation, les fractures sociales ou le terrorisme, Cantet et Campillo livrent une oeuvre qui pose les bonnes questions sans jamais asséner de réponses toutes faites. 
Au cœur de cet atelier d'écriture, pendant lequel les jeunes débattent de leur version de l'histoire, ils se cherchent, apprennent à se connaitre. Érigeant les mots et la littérature comme une puissance salvatrice et cathartique, l'Atelier propose une lecture intéressante des mécanismes éducatifs. Les mots plus forts que les armes en somme.



Tension

La dualité se retrouve dans la construction même du film. Sa première partie prend la forme d'une chorale aux accents de documentaire où la ville occupe une grande place, au-travers notamment d'images d'archives. Une première partie très lumineuse qui s'estompe peu à peu, pour tendre vers le film noir, sombre, tendu, plus intime avec un point de vue resserré autour du bel Antoine et d'Olivia, fascinée et inquiète. Antoine, abreuvée de vidéos et de jeux vidéos, est un jeune homme seul, qui s'ennuie, sans réels amis, ni travail. Comment le comprendre et le mettre sur la (bonne) voie ?


Le malaise, l'incompréhension, la peur, le désœuvrement sont au cœur de cette deuxième partie où le soleil écrasant a laissé place à la lune et à la nuit minérale. Là, au cœur des magnifiques calanques de la Ciotat, c'est un combat qui éclate. Un combat intime, qui peut-être, enfin, le libérera. 


Note : 8/10

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